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Page:Mikhaël-Lazare - La Fiancée de Corinthe, 1888.djvu/20

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maintenant. Que sert-il de parler de visions vaines quand je puis te serrer dans mes bras et de mes lèvres baiser ton front !

(Il l’embrasse.)
Apollonia, le regarde un instant ; puis, les yeux noyés,
regardant dans le vide, elle se parle à elle-même.

Quand viendra-t-elle l’aube éclatante où, loin des étrangers, nous marcherons seuls dans nos jardins aux portes closes parmi les lauriers et les troënes ?

Manticlès

Laisse ma tête s’ensevelir dans ta chevelure fauve ; que nos haleines se mêlent, que les battements de nos cœurs se confondent. Ils sont aimés des Immortels ceux qui meurent jeunes. Je voudrais que les Euménides nous reçoivent tous deux au seuil de l’Hadès, comme des amants fugitifs dans un bois sacré ; car j’ai peur de périr séparé de toi.

Apollonia, effrayée.

Tais-toi, Manticlès ! Quelle divinité mauvaise te souffle ces paroles ? Un frisson d’épouvante s’est emparé de moi. Tais-toi, ne parle plus de la mort !

Manticlès

Comment n’y pas songer ? Je pars, Apollonia, et il me semble qu’en sortant de ta maison bien-aimée je quitte la terre radieuse. Je te dis adieu, et je crois saluer pour la dernière fois les belles campagnes, et la douce lumière des vivants.

Apollonia, lui met la main sur la bouche.

Tais-toi ! J’ai supplié les Okéanides. Ainsi qu’elles guident vers Délos la trirème sacrée, ainsi elles