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Page:Moke - Le Gueux de Mer ou La Belgique sous le Duc d'Albe, sd.djvu/175

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dont on le gratifiait si généreusement il fronça le sourcil, arma son mousquet et répliqua d’une voix forte : Passe ton chemin, chien de nègre, sans insulter ceux qui valent mieux que toi ! lève l’ancre et prends le large, ou je te lâche ma bordée.

Sans paraître intimidé de cette menace le cavalier se retourna vers son compagnon et lui dit : Don Alonzo, ce compliment vous regarde ; mais quelle que soit la manière dont cet homme ait appris votre couleur, il y a ici un mystère qu’il faut pénétrer.

— Seigneur, répliqua l’autre, votre observation me paraît juste, et si vous le permettez j’adresserai quelques questions à ce guerrier qui vient à nous.

Le premier interlocuteur exprima son assentiment par un geste, et son compagnon s’avança vers le jeune Flamand qui, l’épée encore nue et la visière levée, s’approchait des voyageurs.

— Brave gentilhomme, lui dit le cavalier, oserais-je vous demander quels ennemis vous avez combattus ?

— Des assassins, répondit Louis de Winchestre ! de lâches assassins, qui avaient comploté la mort de deux voyageurs.

— Et connaissiez-vous les victimes qu’ils guettaient ?

— Tout ce que je sais, c’est que l’un était un noir.

— Je vous dois donc la vie, reprit cet inconnu en levant sa visière, et la lune, qui se montrait au milieu des nuages, permit au Flamand de distinguer les traits d’un mulâtre.