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Page:Monneron - Poésies, 1852.djvu/88

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Des Alpes d’alentour l’immense amphithéâtre
Blanchit aux feux de l’aube. Et le chalet du pâtre
Se dore sur le lac, dont l’abîme incertain
Voile les hauts récifs des vapeurs du matin.
« Des monts, dit le chasseur, vois, le front se nuance !
» Les Alpes sur la nue ont rougi d’espérance,
» Et leurs vastes parois nous barrent le chemin ;
» Mais ces pics orgueilleux seront vaincus demain !
» Gage de poésie et de gloire éternelle,
» Ta main est dans ma main, et tu fuis sur mon aile !
» Poète, il faut partir ; nous les vaincrons ce soir ! »
— Sur quoi le chevrier répondit : « Au revoir ! »
Mais sitôt que le barde eut dit : « Quand reviendrai-je ? »
Le manteau se noircit, et s’étoila de neige.
Puis la porte est franchie. Et tous deux, lestement,
Ils s’en vont par le val. Point de bruit ; seulement
Un chevrier là-bas, qui finit sa prière,
Siffle, épanchant du lait dans sa noire chaudière.