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Page:Monselet - Les Oubliés et les Dédaignés, 1876.djvu/101

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CUBIÈRES.

pithalame. Il relut les Tourterelles de Zulmis et fit les Grâces retrouvées ; les arbitres du raffinement lui reconnurent du tour, de la légèreté, de l’enjouement, quelquefois même de l’esprit. Peut-être l’encouragea-t-on un peu plus qu’il ne fallait ; mais il était jeune et il promettait plus qu’il n’a tenu.

Il ne lui restait qu’une dernière formalité à accomplir pour rendre sa transformation parfaite : Dorat lui avait recommandé de s’attacher à quelque dame de condition. L’écuyer de la comtesse d’Artois crut pouvoir se dispenser d’aller chercher fort loin ce qu’il avait presque sous la main. À force de monter et de descendre l’escalier de Dorat, il avait fini par remarquer une jolie femme avec laquelle il se croisait souvent : c’était madame de Beauharnais, fille d’un receveur général des finances, et connue elle-même par une infinité de poésies fugitives. Dorat passait généralement pour son teinturier, et des indiscrets ne craignaient pas de lui donner un titre plus doux. Il faut croire que cette dernière supposition était dénuée de fondement, ou du moins que le jeune Cubières, dans la candeur de son âme, n’y accordait aucune créance, — car ce fut à madame de Beauharnais qu’il résolut d’adresser ses premiers hommages.

En conséquence, il choisit dans son carquois une flèche acérée, et, après avoir imploré le dieu de la double colline, il lui décocha le madrigal suivant :

PORTRAIT DE MADAME DE B***

Comme La Fayette elle écrit,
Et comme Ninon elle est belle ;
Elle a leur grâce, leur esprit,