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Page:Monselet - Les Ressuscités, 1876.djvu/28

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LES RESSUSCITÉS

qui l’a vu vivre : nous appartenons à celle qui l’a vu mourir ; mais nous appartiendrons surtout à celle qui le verra se survivre. Où donc serait le mal quand on demanderait quelquefois à la jeunesse son opinion sur les hommes et les choses du temps ? Il est bon de s’inquiéter de ce que pensent du présent ceux qui seront l’avenir.

Un matin de juillet dernier, deux voitures noires gagnaient tristement les côtes de Bretagne. Dans l’une d’elles, il y avait le corps du grand auteur. Dans l’autre, il y avait un curé, un exécuteur testamentaire, et François, le valet de chambre. Ces deux voitures arrivèrent ainsi à une petite ville voisine d’Avranches. Pendant qu’elles stationnaient sur la route en attendant des chevaux, une dame d’un certain âge, tenant un modeste bouquet enveloppé dans du papier, s’approcha avec crainte. Elle déposa son présent sur la banquette intérieure en disant à voix basse : — C’est pour M. de Chateaubriand ; c’est tout ce que j’ai pu me procurer.

Nous faisons comme la vieille dame. Voici notre bouquet.