Aller au contenu

Page:Monselet - Les Ressuscités, 1876.djvu/32

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
24
LES RESSUSCITÉS

Elle s’appelait Lucile. Ce nom, il ne l’a jamais dit, il ne l’a jamais tracé. C’était moins une jeune fille qu’une ombre de jeune fille, glissant à peine sur terre et prête à se dissoudre en ondoyante vapeur, comme ces figures que les peintres montrent vaguement dans le lointain des forêts enchantées. Pour je ne sais quel motif, expliqué par la science médicale, un collier d’acier comprimait les ondulations de son cou flexible et long comme celui d’un cygne. Cette étrange enfant était consumée par une sensibilité nerveuse développée à l’excès ; et l’on eût dit, à la voir frêle, gracieuse et blanche, une de ces vierges, nées d’une larme, qui se trouvent au fond de quelques poèmes mystiques. Tous deux, le frère et la sœur, se promenaient souvent dans les landes, ou bien, assis sur la chaussée de l’étang, ils laissaient venir à eux la nuit étoilée, avec ses rumeurs confuses et ses chauds parfums qui gagnent imperceptiblement le cœur et finissent par le submerger.

Pourquoi voulait-il se tuer ? — Un jour, le fusil sous le bras, il descendit plus lentement que de coutume le perron du château ; il se