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Page:Montesquieu - Deux opuscules, éd. Montesquieu, 1891.djvu/55

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Les grands Princes, non contents d’acheter les troupes des plus petits, cherchent de tous côtés à payer des alliances, c’est à dire presque toujours à perdre leur argent.

La suite d’une telle situation est l’augmentation perpétuelle des tributs, &, ce qui prévient tous les remèdes à venir, on ne compte plus sur ses revenus, mais on fait la guerre avec son capital. Il n’est pas inouï de voir des Etats hypothéquer leurs fonds pendant la Paix même, & employer pour se ruiner des moyens extraordinaires & qui le sont si fort que le fils de famille le plus dérangé auroit de la peine à les imaginer pour lui[1].

XXV

Les Monarques d’Orient ont cela d’admirable dans leur Gouvernement qu’ils ne lèvent aujourd’hui que les tributs que levoit le fondateur de leur Monarchie ; ils ne font payer à leurs Peuples que ce que les pères ont dit à leurs enfans avoir payé eux-mêmes. Comme ils jouissent d’un grand superflu, plusieurs d’entre eux ne font[2] d’Edits que pour exempter chaque année de tributs quelque Province de leur Empire. Les manifestations de leur volonté sont ordinairement des bienfaits ; mais

  1. V. Esprit des Lois, l. XIII, ch. xvii.
  2. C’est l’usage des Empereurs de la Chine. (M.)