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Page:Multatuli - Max havelaar, traduction Nieuwenhuis, 1876.djvu/354

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Aussi, chaque fois qu’elle mettait des herbes fraîches sur la blessure du buffle, elle caressait le brave animal, et lui adressait de douces paroles pour lui faire comprendre sa reconnaissance maternelle.

Plus tard, aussi, quand, par l’ordre du chef, la brave bête fut conduite à l’abattoir, la mère de Saïdjah espérait encore qu’elle comprendrait ses cris, et ses pleurs, et qu’elle devinerait qu’on ne l’abattait pas par l’ordre de ses derniers maîtres.

Peu de temps après, le père de Sâidjah s’enfuyait du pays, pour échapper à la peine, qui devait lui être infligée pour le non paiement de son fermage.

Il était complètement ruiné, et dans l’impossibilité de remplacer son dernier buffle.

Ses parents, et les parents de sa femme, habitant toujours le district de Parang-Koudjang, ne pouvaient lui être d’aucun secours.

Il avait bien continué à travailler à l’aide de bêtes louées, mais, c’était un travail ingrat, et navrant pour un ancien propriétaire de buffles.

La mère de Saïdjah mourut de chagrin, et ce fut alors, que dans un moment de découragement, son père s’enfuit de Badour pour aller gagner sa vie dans le district de Buitenzorg.

Parti sans feuille de route, il se vit ramener à Badour par la police, et subit la peine de la bastonnade.

Enfin, on l’enferma dans une maison de fous.

Fou ! Je veux bien croire qu’il l’était.. Il avait assez souffert pour le devenir ! mais, ne craignait-on pas plutôt que le désespoir ne le poussât à la révolte !

Il ne resta pas long-temps dans sa prison. La mort vint vite le rendre libre.

Quant aux petits frères, et aux petites sœurs de Saïdjah, je ne sais pas ce qu’ils devinrent.