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Page:Multatuli - Max havelaar, traduction Nieuwenhuis, 1876.djvu/57

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jour, par-ci par-là, quelques pages, et je gagnais de plus en plus, — Frédéric dit : d’autant plus mais, moi, non, — la conviction qu’il faut être commissionnaire en cafés pour être renseigné si exactement sur ce qui se passe dans le monde. Je suis certain que les Rosemeyer, qui font les sucres, n’ont jamais eu sous les yeux quelque chose de pareil.

Je craignais maintenant que cet Homme-au-Châle ne réapparût tout-à-coup, ayant encore quelque chose à me dire. Voilà qui me fit regretter d’avoir pris, l’autre soir, cette petite rue de la Chapelle, et je reconnus qu’il ne faut jamais s’écarter du droit chemin. Naturellement, il m’aurait demandé de l’argent, et parlé de son paquet. Peut-être me serais-je décidé à le secourir, et le lendemain ses paperasses seraient devenues ma propriété. Il m’eut été loisible, cela fait, de séparer le blé de l’ivraie ; après avoir trié les parties raisonnables, utiles à mon livre, j’aurais fait du reste un feu de joie, ou je l’aurais jeté au panier, ce que je ne puis pas me permettre aujourd’hui. S’il revenait, je serais forcé actuellement de lui rendre le tout, et le drôle, voyant que je m’intéresse à quelques unes de ses palinodies ne manquerait pas d’en exiger un prix exagéré. Rien ne donne plus de force au vendeur, que la certitude du cas que l’acheteur fait de sa marchandise. Aussi, pareille situation est-elle évitée, autant que possible, par un commerçant qui connaît son métier.

Une autre idée, — déjà énoncée par moi, — démontrera, je l’espère, comment malgré la fréquentation de la Bourse, le cœur peut rester ouvert aux influences philanthropiques. Cette idée, la voici : Bastien, — notre troisième commis, — se fait si vieux et si infirme, que le mois dernier, vingt-cinq jours sur trente, il n’est pas venu au bureau ;