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Page:Necker - Opinion, Relativement au Décret de l'Assemblée Nationale, concernant les titres, les noms, et les armoiries.djvu/11

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leurs ancêtres ; & il ſeroit rigoureux, ſans aucune utilité pour perſonne, de les obliger à renoncer à un genre de ſatisfaction dont la valeur doit être entretenue pour l’avantage même de la ſociété. On trouveroit juſte & louable le déſir qu’auroit une famille eſtimable de changer de nom, ſi l’un de ſes membres l’avoit ſouillé par un attentat contre la patrie. Le même principe doit expliquer l’intérêt que peuvent avoir beaucoup de maiſons à conſerver les dénominations ſous leſquelles on les a vues paroître avec honneur dans les Annales de l’Hiſtoire. De tels ſentimens ſont naturels, & ils entrent avantageuſement dans le mécaniſme moral de tous les ſyſtèmes politiques.

La confuſion, inſéparable de ces changemens de nom relativement aux actes de partage & à toutes les tranſactions qui s’enchaînent les unes aux autres, préſente encore une conſidération digne de l’attention de l’Aſſemblée Nationale.

Les observations qu’on a préſentées en parlant des noms & des titres, s’appliquent de même à la proſcription des armoiries. On aperçoit ſeulement, que devenues preſque libres depuis long-temps, il y a d’autant moins de motifs pour en ordonner la ſuppreſſion. Rien n’eſt certainement plus indifférent au peuple que l’exiſtence de ces armoiries ; cependant leur ſuppreſſion peut facilement ſe lier dans ſon eſprit à d’autres idées, & devenir ainſi un motif ou un prétexte pour s’élever contre ceux qui ſe détacheroient lentement de ces diſtinctions inhérentes les unes aux vieilles pierres de leurs châteaux, & les autres aux antiques marbres qui couvrent la cendre de leurs ancêtres. Il eſt des temps où la ſageſſe, où la ſimple bonté peut-être, invitent à n’ordonner aucune diſpoſition, aucun mouvement qui ne ſoient eſſentiellement néceſſaires.