Aller au contenu

Page:Noriac, Gille - Pierrette et Jacquot.pdf/11

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
DURAND.

Elle est bien simple ; vous auriez fait comme moi. J’étais, il y a trois ans, devant mon café, boulevard Poissonnière, quand tout à coup, je vis un pauvre petit diable en sabots, tournant une vielle, sur son estomac, comme ça… moi qui suis de ce pays-là…

MADAME PATACHA.

Vous êtes Savoyard ?

DURAND.

Dites Savoisien, c’est plus doux ; oui je suis Savoyard, ça m’a fait quelque chose, et je me suis dit : puisque tu es sauveteur, eh bien, sauve celui-là ; je le prends, je le débarbouille, je le mets chez un menuisier ; il vient me voir le dimanche, et voilà ce qui fait que le soir, en m’endormant, il me semble quelquefois entendre… (Il imite et danse le refrain de la vielle, Madame Patacha fait comme lui.)

MADAME PATACHA.

Ça me va au cœur !

DURAND.

Mais vous êtes donc Savoyarde ?

MADAME PATACHA.

Non, votre récit m’a émue, voilà tout ; non, ce n’est pas tout, car je sais que vous en avez aussi adopté un autre, une jeune fille.

DURAND,

Oui, je l’ai trouvée par hasard, il y a deux ans, au chemin de fer de Lyon : Je vois une petite malheureuse, très mal vêtue ; elle vient à moi d’un air de confiance ; je la prends, je la débarbouille, je la mets chez une blanchisseuse, elle vient me voir le dimanche, et voilà, vous en auriez fait autant à ma place.

MADAME PATACHA.

Voilà comme on fait des ingrats, tandis qu’avec mes petits Chinois… (Voix au dehors.)