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Page:Palissy - Oeuvres complètes (P. A. Cap, 1844).djvu/101

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toutesfois l’airain est venu de couppe-roze, qui n’est autre chose que sel. Veux-tu bien sçauoir la cause pourquoy en tastant à la langue, tu n’aperçois aucun goust de sel ? La cause est, parce que les matieres sont si bien fixes, qu’elles ne se peuuent dissoudre par l’humidité de la langue, comme fait le sel commun. Le sel commun, la coupe-roze, le vitriol, l’alun, le sel armoniac, et le sel de tartare, toutes ces especes, soudain qu’elles sont tant peu soit-il humectees du bout de la langue, elles se dissoudent, et lors la langue trouue aisement le goust, parce que l’humidité de ladite langue fait attraction, et dilate les parties de toutes ces especes de sel : mais quand vn sel est bien fixe auec l’eau, et la terre, ou autres choses à luy iointes, lors il ne se peut dissoudre, que par bonne Philosophie, ou par le moyen et pratique de Philosophie. Exemple. Le verre est la plus grande partie de sel et d’eau ; ie dis de sel, à cause du salicor, qui est un sel d’herbe : apres, ie dis d’eau, parce que les cailloux ou sable ioints au sel de salicor, sont partie d’eau et de sel. Or est-il ainsi, que si tu tastes vn verre à la langue, tu n’as garde de le trouuer salé, combien que ce ne soit la plus grande partie que sel : Qui est donc la cause que l’humidité de la langue ne peut faire attraction de la saueur dudit sel ? C’est pour la mesme cause que i’ay dit, que les matieres terrestres, aineuses et salsitiues, sont si bien jointes ensemble, qu’elles ne se peuuent dissoudre, sinon par industrie et pratique. Un iour vn Alchimiste trouua fort estrange, que ie luy dis, que ie tirerois du sel d’vn verre, il pensoit estre bon Philosophe, mais il n’auoit pas encore pratiqué iusques là, combien que la chose fust assez aisee. Ie ne te parleray plus de ces choses, sçachant bien, que si tu ne reçois les raisons que ie t’ay donnees, ce seroit folie de t’en monstrer d’auantage.

Demande.

Ie ne t’en feray aussi plus de question : mais ie voudrois que tu m’eusses dit quelque chose de l’essence des métaux.

Responce.

C’est vne regle bien accordee entre les Philosophes, que les metaux sont engendrez de souphre et d’argent vif, ce que ie leur accorde : ce neantmoins, il y a quelque espece de sel qui aide à la congelation. Nous ne pouuons nier, que l’argent,