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aussi sans iamais changer. Il n’y a pas long-temps, que i’estois au pays de Béarn, et de Bigorre, mais en passant par les champs, ie ne pouuois regarder les laboureurs, sans me cholerer en moy-mesme, voyant la lourdeté de leurs ferremens : et pourquoy est-ce qu’il ne se trouue quelque enfant de bonne maison, qui s’estudie aussi bien à inuenter des ferremens vtiles pour le labourage, comme ils sçauent estudier à se faire decouper du drap en diuerses sortes estranges ? Ie ne puis me tenir de dire ces choses, considerant la folie et ignorance des hommes.

Demande.

Quels outils faudroit-il pour edifier un tel iardin, que tu m’as cy dessus designé ?

Responce.

Il faudroit de toutes les especes d’outils seruans à l’agriculture : et parce qu’il y a des colomnes, et autres membres d’architecture, il faudroit de toutes les especes d’outils propres à la Geometrie.

Demande.

Ie te prie me les nommer icy par rang l’vn apres l’autre.

Responce.

Nous auons le Compas,
La Reigle,
L’Escarre (equerre),
Le Plomb (l’à-plomb),
Le Niueau,
La Sauterelle (fausse équerre),
Et l’Astrolabe.

Voila les outils par lesquels on conduit la Geometrie et l’Architecture.

Puis que nous sommes sur le propos de Geometrie, il aduint la semaine passee, qu’estant en mon repos sur l’heure de minuict, il m’estoit auis, que mes outils de Geometrie s’estoient esleuez l’vn contre l’autre, et qu’ils se debatoient à qui appartenoit l’honneur d’aller le premier, et estant en ce debat, le compas disoit, Il m’appartient l’honneur : car c’est moy qui conduis et mesure toutes choses : aussi quand on veut reprouuer un homme de sa despence superflue, on l’admoneste de viure par compas. Voila comment l’honneur m’appartient d’aller le premier. La reigle disoit au compas, Tu ne sçais que tu dis, tu ne sçaurois rien faire qu’vn rond seule-