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Page:Palissy - Oeuvres complètes (P. A. Cap, 1844).djvu/169

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bien peu de gens : Ie dis à bien peu, car quand bien peu de gens auroient du biscuit pour certaines annees, il n’y aura si furieux Canonniers, ny si subtils ingenieux, qui ne soyent contraints de leuer le siege de deuant vne telle Ville, voire à leur confusion.

Item, on s’estonnera de ce que ie dis, qu’elle seroit imprenable par sapes, mais ie dis d’auantage, que quand les ennemis auroient sapé et emporté les fondemens de tout le circuit de la Ville, et qu’ils les eussent iettez aux abysmes de la mer, si est-ce que par tel moyen les habitans n’auront occasion de s’estonner, parce que les murailles demeureront encore debout comme auparauant. Et quand il aduiendroit, que les ennemis se fussent opiniastrez d’auantage, et qu’ils eussent rué tout à l’entour du circuit des murailles, autant de coups de canons qu’il pourroit tomber de gouttes d’eau durant les pluyes de quinze iours, et que par tel moyen, ils eussent mis tout le circuit des murailles à petits morceaux comme chapple, c’est à dire, mis les murailles à bas et en friche, si est-ce que pour cela, la Ville ne seroit aucunement perduë, ny les habitans blessez en leurs personnes.

Et qui plus est, quand les ennemis se seroyent encore plus opiniastrez et qu’ils eussent brisé vne carriere tout à trauers de la Ville, et qu’ils peussent passer et repasser à trauers de ladite Ville iusques au nombre de quarante de front, trainans auec eux toutes especes d’engins et artillerie, si est-ce qu’ils n’auroient pas encore gagné la Ville : ce que ie sçay qui sera trouué fort estrange.

Ie dis aussi, que quand les ennemis auroient trouué le moyen par vne subtile mine, de sortir en vne place, qui sera au milieu de la Ville, et qu’ils seroient entrez en ladite Ville, en si grand nombre d’hommes et artillerie, que toute ladite place fust pleine de gens bien armez, si est-ce que par tel moyen ils n’auront gagné aucune chose, sinon raccourcissement de leurs iours.

Et quand il aduiendroit, que les ennemis auroient fait vne telle approche, que par multitude de gens ils eussent fait des montagnes, qui fussent si hautes, que les ennemis peussent auoir veuë iusques au paué des rues prochaines des murailles, pour ietter boulets et toutes especes d’engins et feux estranges, par tel moyen les habitans ne receuront aucun dom-