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Page:Palissy - Oeuvres complètes (P. A. Cap, 1844).djvu/18

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gionnaires, et se dévoua plus d’une fois pour les sauver. Le comte de La Rochefoucauld, général de l’armée royale en Saintonge, déclara son atelier un lieu de franchise. C’était, dit un de ses biographes, une sorte de droit d’asile accordé au génie ; mais ce privilége ne fut pas long-temps respecté. Malgré la protection de MM. de Burie, de Ponts et de Jarnac, Palissy fut enlevé pendant la nuit par les officiers de justice, et conduit dans les prisons de Bordeaux. Son atelier fut démoli, et le grand artiste eût été infailliblement envoyé au supplice sans l’intervention du Connétable, qui, tout-puissant auprès de Catherine, obtint du roi, par l’entremise de sa mère, qu’il fût rendu à la liberté. On lui accorda en même temps le brevet d’inventeur des rustiques figulines du roi. Ce titre, en l’arrachant à la juridiction du parlement de Bordeaux, attribuait au grand conseil la connaissance de sa cause, ce qui équivalait à un ajournement indéfini.

L’année suivante, en 1563, Palissy publiait à La Rochelle son ouvrage intitulé : recepte véritable, par laquelle tous les hommes de la France pourront apprendre à multiplier et à augmenter leurs thrésors. C’est sans doute pendant les tristes jours de sa captivité, et tandis que son atelier renversé ne lui permettait plus de se livrer à ses travaux ordinaires, que fut composé ce petit volume, d’un intérêt si piquant, si varié, et qui semble résumer toutes les pensées, tout le caractère de son auteur. Son âme naïve, mais énergique, son coup d’œil droit et plein de sagacité, son génie artistique, ses goûts, ses opinions, ses connaissances, et jusqu’aux promesses qu’il fait à l’avenir, tout s’y révèle et s’y retrouve à la fois. Et que l’on ne fasse pas à cet ouvrage le reproche d’être sans ordre et sans liaison dans les idées ; Palissy ne composait pas un livre, un traité dogmatique, comme l’entendent de nos jours les hommes de science ; il ne faisait qu’émettre ses pensées, ses observations, ses receptes, ainsi qu’il les appelle, dans l’ordre où tout cela se succédait dans son esprit ou dans sa mémoire ; à la vérité, sans plan arrêté à l’avance, sans préten-