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Page:Palissy - Oeuvres complètes (P. A. Cap, 1844).djvu/205

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ET FONTAINES.

grand nombre de petis trous au trauers de la terre, par lesquels sortent des flambes de feu procedantes du souphre qui est allumé par dessouz la terre, et disent que les trouz ne sont pas plus grands que trouz de vers, et au tour de l’entree desdis trouz l’on trouue du souphre, que les flambes du feu ont esleué de dessouz la terre, et cesdits feux n’aparoissent que de nuit. Tu peux connoistre par là que le feu prenant aspiration par lesdits trouz brusle sans faire aucune violence ny tremblement en la terre. Autant en est il de celuy qui eschauffe les eaux des bains par ce qu’il prend haleine par le canal desdites eaux. Iusques à présent i’ay pris peine de te faire entendre la cause des bontez ou malices des eaux, tant de celles des sources naturelles, que des puits, mares et autres receptacles, et tout cela tendant afin que tu connoisses mieux la bonté de l’eau des fontaines, que ie te veux apprendre à faire és lieux les plus steriles d’eaux. Ie laisseray donc tous autres propos pour venir à la cause des sources naturelles : Et ce d’autant qu’il est impossible d’imiter nature en quelque chose que ce soit, que premierement l’on ne contemple les effects d’icelle, la prenant pour patron et exemplaire, car il n’y a chose en ce monde où il y ait perfection, qu’és œuures du souuerain. En prenant donc exemple à ces beaux formulaires qu’il nous a laissez, nous viendrons à l’imitation d’iceux.

Quand i’ay eu bien long temps et de pres consideré la cause des sources des fontaines naturelles, et le lieu de là où elles pouuoyent sortir, en fin i’ai conneu directement qu’elles ne procedoyent et n’estoyent engendrees sinon des pluyes[1]. Voila qui m’a meu d’entreprendre de faire des recueils des pluyes, à l’imitation et le plus pres approchans de la nature, qu’il me sera possible ; et en ensuyuant le formulaire du souuerain fontenier, ie me tiens tout asseuré que ie pourray faire des fontaines desquelles l’eau sera autant bonne, pure et nette, que de celles qui sont naturelles.

Theorique.

Apres que i’ai entendu ton propos ie suis contraint de dire que tu es vn grand fol. Me cuides tu si ignorant que ie veuille adiouster plus de foy à ce que tu dis, qu’à vn si grand nombre

  1. Palissy est évidemment le premier qui, par suite de ses observations, ait été amené à attribuer l’origine des eaux de source aux infiltrations des eaux de pluie.