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Page:Palissy - Oeuvres complètes (P. A. Cap, 1844).djvu/26

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XVIII

cessé d’être les sujets de ses expériences et de ses méditations. Riche des faits nombreux qu’il avait observés et recueillis, il songeait depuis long-temps à les rendre publics ; mais ne sachant pas, grâce à son ignorance des langues anciennes, si les philosophes de l’antiquité avaient eu sur les mêmes sujets des opinions analogues ou contraires aux siennes, il résolut de faire la démonstration publique de ses théories et d’appeler à ses leçons les hommes les plus éclairés de l’époque. C’était une sorte d’expédient à l’aide duquel il voulait s’assurer si ses vues étaient fondées, en provoquant à leur sujet la critique et les objections des érudits. Cependant, il avait rassemblé tous les objets naturels propres à confirmer ses idées à l’égard de certains phénomènes physiques, particulièrement sur la formation des cristaux, les pétrifications et les principes de la géologie. Ce cabinet d’histoire naturelle, le premier qui eût été formé à Paris, était disposé, non d’après une méthode générale, systématique, mais dans l’ordre des démonstrations qui faisaient l’objet de son cours. Ces leçons étaient également les premières conférences publiques qui avaient lieu sur les sciences physiques et naturelles. Et n’est-ce pas un tableau digne du plus haut intérêt que celui d’un simple potier de terre, d’un homme sans culture, sans connaissance de l’antiquité, venant exposer les résultats de ses découvertes en présence de tout ce que la capitale renfermait alors de savants, provoquer la critique, les argumentations sur les sujets les plus ardus ; et tout cela, non dans l’intérêt de sa gloire, mais dans celui de la science et de la vérité ! sorte d’académie, de congrès scientifique, où chacun avait le droit de relever les fautes de l’orateur, mais où l’on ne vit jamais s’élever la moindre contradiction. On peut juger de la hardiesse, de la singularité d’une telle entreprise, en voyant la plupart des savants de son époque, et même des siècles qui l’ont suivie, s’étonner avant tout que l’on pût posséder quelque science, quelque talent, sans avoir appris le latin et le grec. Palissy s’en étonna d’abord lui-même et