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Page:Palissy - Oeuvres complètes (P. A. Cap, 1844).djvu/395

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DE LA MARNE.

i’ay veu les chesnes, noyers, chastaigniers, et plusieurs autres especes d’arbres, plantez és lieux champestres, entre lesquels ie n’en ay iamais trouué vn qui montast directement en haut, comme ceux qui sont és forets entourez d’autres arbres qui les empeschent à se dilater de part et d’autre. Ie n’ay iamais aussi trouué que les arbres des forests fussent fertiles abondamment, comme ceux des campagnes, ny aussi que le fruit d’iceux fut sauoureux en telle sorte que ceux qui ont l’air et le soleil à commandement : dont il est aisé à conclure que les arbres des forests qui sont entourez d’autres arbres, ne pouuant iouir du Soleil et de l’aër és parties dextre et senestre, sont contrains monter en haut pour chercher l’aër et le soleil, lequel ils désirent pour leur nourriture et accroissement. Et comme ie cherchois la connoissance de ces causes, ie passay quelquefois par vne forest qui contenoit trois lieues de largeur, et afin de rendre le chemin aisé, l’on auoit coupé, tout au trauers de la forest, les arbres d’vne voye contenant en largeur huit ou dix toises : en passant ladite forest, i’apperceu que tous les arbres qui estoyent à dextre et à senestre de ladite voye, auoyent poussé grand nombre de branches deuers le costé du chemin ; et deuers la partie de la forest, il y en auoit fort peu, qui me donna certaine connoissance que le tronc de l’arbre prenoit son plaisir à pousser les branches vers le chemin, par ce que c’estoit la partie la plus aërée : i’apperçeu aussi que les arbres de la circonference de la forest se iettoyent et courboyent ou s’enclinoient deuers le costé des terres, comme si les autres arbres leur estoyent ennemis : et à la verité bien souuent il y a plusieurs arbres fruitiers tant és iardins que autres lieux qui sont courbez pour cause de l’ombre de leurs voisins, autres arbres desquels ils n’ayment estre accompagnez.

Theorique.

Par tes propos tu veux dire qu’apres que les feuilles, fruicts et branches des arbres et plantes sont pourries elles se peuuent reduire en pierre.

Practique.

Ie l’ay dit, et encores plus, comme tu peux auoir entendu au discours des metaux, que non seulement les choses putrifiées se peuuent lapifier, ains se peuuent petrifier au parauant la putrefaction, comme tu as veu par les bois et coquilles, et