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Page:Palissy - Oeuvres complètes (P. A. Cap, 1844).djvu/442

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ce qu’il dit est faux, et ne contient verité (comme i’ay dit) et aussi que les abus de quoy il nous charge, ne viennent de nous, mais d’eux-mesmes, si abus y a. Ie ne pourrois endurer voir deuant mes yeux denigrer et vilipender vn si noble estat comme celui de la Pharmatie que ie n’estime moins que la Medecine et Chirurgie.

L’autre partie de la rancune et haine qu’il a conçeu contre les Apoticaires, c’est à cause qu’ils pratiquent et pansent les malades sans luy, se y sentant fort interessé, sans considerer que par charité il faut aider aux pauures qui n’ont de quoy payer le Medecin, non-seulement pour achepter une poulie pour se substanter : car il ne faut pas attendre que la plus grand part des Medecins de maintenant les aillent visiter s’ils n’en pensent estre payez, et deussent-ils mourir tout quant et quant. Parquoy ne deuons estre blasmez si à ceux nous administrons la medecine sans eux : car il en mourroit beaucoup si n’estoit ce peu d’aide et secours que nous leur baillons, dequoy de la plus grand part n’en avons iamais rien, et y perdons temps et drogues, et eux qui n’y fournissent que leur peine, n’y retourneront iamais s’ils ne sont payez. Il fait excuse disant que les Apoticaires practiquent sans eux pour gaigner dauantage, qui est au contraire, car là où le Medecin ordonne, l’Apoticaire y a plus de prouffit de la moitié, et est mieux payé et a moins de peine. Ils se peuuent bien plaindre et gruser, disant que les Apoticaires se font incontinent riches en suruendant leurs drogues, qui est bien à rebours : car de tous les estats de ce monde, c’est le plus mal payé, le plus suiet et le plus mal estimé.

Ie ne m’esbays pas si ceux qui l’exercent se meslent d’autre vacation : car la leur est tant anichilée, et tant mise au bas par les Medecins et Chirurgiens, que les pauures Apoticaires n’y trouuent nul prouffit, et semble aux malades qu’ils les doivent panser et soliciter gratis, pour leurs beaux yeux : disant (quand ils sont gueris), que m’auez vous baillé ? des herbes : et voila comme les pauures Apoticaires sont payez.

Quant au Medecin, il est payé contant, ou s’il n’est payé il n’y retournera plus, encores qu’il n’y fournit rien que sa peine, et l’Apoticaire fournit de sa peine beaucoup plus que le Medecin : car il faut qu’il applique tout, et dauantage fournit ses drogues, son temps, et de ses seruiteurs, et quelquefois