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Page:Palissy - Oeuvres complètes (P. A. Cap, 1844).djvu/455

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dies, et le danger où ils mettent leurs malades, par leur grand betise et nonsçauance, cuidant auoir la vertu d’vn medicament par vn moyen dont il n’est possible, comme des huiles qui se vsent auiourd’huy en la pharmatie, qui est vn grand abus, et ne l’ont encores cogneu nos Medecins, et encores pullulent.

Les Medecins diront que c’est nous qui le faisons et l’auons inuenté, qui est bien au contraire : car si tu cherches les vieux dispensaires et les nouueaux, tu trouueras la maniere de faire lesdites huiles, escrite ià passé cent ans, qui est si très-fausse et abusiue, que vn asne y mordroit : et si en vsent encores auiourd’huy, c’est qu’ils ordonnent communement huile de menthe, absinthe, rue et autres qui sont faites desdites fleurs, fruits et autres, auec huile d’oliue, pensant auoir la vertu desdites herbes en l’huile d’oliue qui est chose impossible : car ce sont toutes choses contraires, comme le feu et l’eau.

Tu es bien abusé de penser incorporer les eslemens aqueux et liquides auec les eslemens de nature oleagineuse et crasse ; tu assemblerois et incorporerois aussi tost le feu et l’eau comme tu ferois entrer la vertu d’vne herbe ou plante en huile ou gresse, et l’experience te le monstre euidemment. Regarde vne huile où tu auras bouilli force herbes ou fleurs, et la fais en la meilleure mode que tu sçauras, et tu trouueras que ton huile ne tient du goust ou saueur de son suiet, et moins de l’odeur ; parquoy tu peux iuger que la vertu n’y est pas demeurée, et n’en tient rien.

Autre experience ; prens de l’huile laquelle tu voudras, et de l’eau, et tasche de les incorporer ensemble, et y fais tout ce que tu sçauras et pourras, et si tu les incorpores simples, sans y rien adiouster, qu’ils ne se separent d’ensemble, ie payeray ce que tu voudras ; et à cela tu peux cognoistre qu’ils ne sont de semblable nature, mais differente et contraire ; parquoy tu ne peux ioindre les facilitez et vertus ensemble.

Autre experience ; prens vn simple tel que tu voudras, et le distille, et tu verras que le feu chasse l’eau la premiere : car il fait tousiours son action à son contraire, et puis à son semblable qui est l’huile, à part et non iamais ensemble, qui te monstre bien que l’huile et l’eau ne sont de semblable vertu, mais bien contraire : car toutes huiles tiennent plus du feu que des autres eslemens, et fust l’herbe froide dont l’huile