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Page:Palissy - Oeuvres complètes (P. A. Cap, 1844).djvu/69

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aisément, que toutes cendres sont aptes à la buee (lessive), aussi tu me confesseras qu’elles ne peuuent seruir qu’vne fois en ladite buee, si tu me confesses cela, c’est assez : car par là tu dois entendre, que le sel qui estoit aux cendres, s’est dissout et meslé parmi la lessiue, et cela a causé d’emporter les saletez et ordures des linges, à cause de sa mordication : dont s’ensuit, que la lessiue est teinte et oligineuse dudit sel, qui est dissout parmi, et la lessiue estant venue en sa perfection, elle a emporté tout le sel qui estoit ausdites cendres, d’où vient que les cendres demeurent alterees, et inutiles, et la lessiue qui a emporté le sel desdites cendres, a tousiours quelque vertu de nettoyer. Si tu ne veux croire ces raisons, pren vn chauderon de lessiue, et le fay bouillir iusques à ce que l’humide soit tout éuaporé, et lors tu trouueras le sel au fons de la chaudière. Si les argumens susdits ne sont suffisans, pren garde à la fumee du bois : car il est ainsi, que les fumees de toute espece de bois, font cuire les yeux, et endommagent la veuë, et ce, pour cause de certaine salsitude, qu’elle attire du bois, lors que les autres humeurs sont exhallees par la vehemence du feu, qui chasse les matieres haineuses et humides. Et qu’ainsi ne soit, tu le cognoistras, lors que tu feras bouillir l’eau dans quelque chaudiere, parce que la fumee de ladite eau ne te nuira aucunement à la veuë, combien que tu presentes les yeux sur ladite fumee. Et pour mieux encore et prouuer qu’il y a du sel és bois et plantes, considere l’escorce, de laquelle les Taneurs courrayent leurs peaux : si elle est sechee, et puluerisee, elle endurcist et garde de putrefier les peaux des bœufs et autres bestes. Cuides-tu que les escorces de chesne eussent vertu d’empescher la putrefaction desdites peaux, sans qu’il y eust du sel esdites escorces ? Non pour vray, et si ainsi estoit que l’escorce eust ceste vertu, elle pourroit seruir plusieurs fois, mais dés qu’elle a serui vne fois, l’humidité de la peau a fait attraction, et a dissout le sel qui estoit en l’escorce, et l’a prins et attiré à soy, pour se fortifier et endurcir. Et ainsi, ladite escorce ne sert plus de rien que de mettre au feu, apres qu’elle a serui vne fois seulement.

Autre exemple. Il me souuient auoir veu certaines pierres, qui estoient faites de pailles bruslees, ce qui ne peut estre fait, sans que lesdites pailles tiennent en soy grande quantité