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Page:Parigot - Alexandre Dumas père, 1902.djvu/111

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LES COMÉDIES.

que si je me présentais, moi, pour vous épouser ? — Vous ? — Vous me refuseriez aussi, n’est-ce pas ? — Oh ! vous, c’est autre chose… J’accepterais !… J’accepterais bien vite ! — Où allons-nous, mon Dieu, où allons-nous ? » Comparez cette scène à celle qu’en ont tirée MM. Meilhac et Halévy dans la Cigale. Ici la verve dissimule une émotion vive ; là, c’est pure fantaisie et ironie de dilettantes.

Si Dumas met un oncle et un neveu en présence, c’est l’oncle qui est fougueux, et le neveu qui est sage. Et plus le neveu grandit en vertu, affection et modestie, plus l’oncle envoie à tous les diables cette inaltérable perfection. « Abstiens-toi et soutiens » n’est pas la devise des héros de Dumas. Le jeune homme avoue-t-il enfin une passion, un mariage secret, l’oncle qui fait le personnage d’Almaviva et s’en arroge tous les droits, s’adoucit, sourit, s’épanouit. « Ah ! je suis d’une gaîté, d’une joie !… Tiens, embrasse-moi, mon ami, embrasse-moi… et reçois ma malédiction ! » Cela est délicieux. Mais qu’a-t-il dit ? Quelle parole est tombée sur cette situation amusante ? Nous sommes sur les lisières du drame. Il en est toujours ainsi. Parmi les mots qui pétillent, la verve qui fuse, l’imagination combine jeux de scène, situations, tableaux, péripéties. Mais je m’avise enfin que Jenny court de plus sérieux hasards que la Suzanne de Figaro, convoitée par ce vieil Anglais qui n’a pas la grâce du comte espagnol, épousée par cet Halifax qui sent la hart ; qu’en tout ceci il n’est question que de violence, de potence, de fille égarée, de femme en détresse ; qu’il y va de la vie pour une nuit de noces ; qu’on y court les