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Page:Parigot - Alexandre Dumas père, 1902.djvu/80

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ALEXANDRE DUMAS PÈRE.

contre l’opinion. L’opinion n’est pas la vertu, mais une caution de dignité, une garantie de fonds social, sur laquelle repose cette communauté d’intérêts, de sympathies, de loisirs et de plaisirs, qui a nom : le monde. Les vitres d’une maison sont-elles fêlées, l’opinion est myope ; mais elle redevient clairvoyante au moindre éclat, et féroce, dès qu’une passion sincère — c’est-à-dire hors des usages et de la prudence — fait scandale et, compromettant la sécurité de la raison sociale, trouble les discrètes liaisons sans amour et les menues voluptés sans esclandre. Alors le monde, atteint dans sa dignité, s’arme de cet instrument à double tranchant, l’opinion ; alors il flétrit l’individualisme encombrant, dénonce l’amour comme un vice, prononce ses arrêts sans appel et les exécute d’un mouvement unanime, avec la rigueur d’une justice véritable. Une seule victime est frappée : la femme que son cœur déclasse, et qui est davantage à portée de la main.

L’intérêt dramatique et poignant du quatrième acte, que Dumas a refait et consacré au monde, n’est pas ailleurs. Par une suite logique de scandales, où se reconnaît la main des femmes, Adèle est coup sur coup, dans le salon de la vicomtesse, dénoncée, affichée et rejetée aux bras d’Antony. Avant l’entrée des deux amants, on respire déjà un air lourd de menaces. M. Eugène, poète sensé et froid, déclare qu’il n’a point rencontré dans le monde « l’amour délirant ». Une prude, « dont on heurte toujours le pied », s’étonne avec des mines pudibondes, qu’on reçoive encore certaine héroïne d’auberge, et certain « problème vivant dans la société ». Cependant les invités