Aller au contenu

Page:Parigot - Le Drame d’Alexandre Dumas, 1899.djvu/131

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
115
LE DRAME NATIONAL ET « HENRI III ».

tien Mercier ; Pixérécourt fut le précurseur du drame national et historique, voire du drame de clocher. « Je suis fier, dit-il dans la Préface de Charles le Téméraire ou le siège de Nancy, d’avoir pu célébrer le lieu de ma naissance. Je l’avouerai, j’ai savouré toutes les jouissances de l’orgueil en retraçant le sublime dévoûment de mes pères[1]. » Et il exprime avec naïveté, noble homme de Lorraine, l’état d’esprit populaire, qui faisait du drame historique l’inévitable conséquence de la Révolution ; dramatiste pour le peuple, il exalte cette superbe attendrie du peuple, qui s’avise que ses ancêtres firent les Croisades et qu’il est l’histoire, lui aussi. Raynouard, avec ses Templiers (1805), Lemercier avec son Charlemagne, arrêté par la censure de l’Empire, suivent un courant général, qui se perd dans la tragédie. Pixérécourt est franchement populaire.

Partant, il se pique d’érudition. Il cite ses auteurs ; il se réfère à Dom Calmet. Il étale ses documents, avant les appendices de Walter Scott, avant les préfaces de Victor Hugo. Pour justifier l’audace qu’il a eue de mettre en scène la chronique du Chien de Montargis, il s’appuie sur une liste d’auteurs graves ou de textes rares, parmi lesquels je distingue Jules Scaliger (De exercitatione, f° 272, édit. de 1557), lequel a glorifié ce chien digne de Plutarque. On lit en note, au bas des pages : « Historique », ou bien : « Propres paroles du duc de Bourgogne extraites d’un manuscrit du temps[2]. » Victor Hugo n’eût pas manqué à nous désigner ce manuscrit précieux. Et déjà l’érudition produit son ordinaire effet sur le théâtre ; Philippe de Commines est imperturbable en ses discours, presque autant que Ruy-Rlas.

  1. Notice et Préface historique, p. 8.
  2. Charles le Téméraire, p. 38 et passim.