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Page:Paul Bourget – L’étape.djvu/195

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LE CHEMIN DU CRIME

son ordre. M. Berthier prend lui-même le livre du mouvement des comptes courants. Il relève le chiffre de vingt-trois mille francs. M. La Croix s’en étonne. Il croyait son dépôt de vingt-huit mille. Il avait dans sa poche son carnet de chèques. M. Berthier et lui commencent à collationner les sommes inscrites sur les talons et celles inscrites sur le grand-livre. Celui-ci portait, entre autres, la trace d’un chèque de cinq mille francs dont le talon était en blanc dans le carnet. M. La Croix s’était bien aperçu, en se servant de ce carnet, que ce talon se trouvait ainsi sans le chèque attenant. Il n’y avait pas accordé d’importance. Il s’était dit : « J’aurai détaché le chèque avec celui « de dessus par distraction. » Il avait, à deux ou trois reprises auparavant, constaté et expliqué de même des manques analogues. M. Berthier va rechercher, parmi les pièces comptables conservées au bureau, ce chèque de cinq mille francs. Il était au nom d’un M. de Montboron, qui l’avait versé à une autre banque, le Crédit départemental, et le Crédit départemental lui-même l’avait fait toucher au bureau C du Grand Comptoir. Or, M. La Croix a déclaré n’avoir jamais même entendu prononcer le nom de M. de Montboron. Il a dû reconnaître que sa signature a été fort habilement imitée, mais tout de même il a prouvé à Berthier, en lui faisant examiner les lettres de très près, que c’était un faux… »

Le malheureux homme s’arrêta dans sa cruelle confidence. Il arrivait à une partie du récit qui lui