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Page:Paul Bourget – L’étape.djvu/457

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LE PÊRE ET LE FILS

comment n’eût-il pas été mortellement inquiet sur la gravité de cette blessure ?… Pour ce qui concernait son fils, hélas ! il n’en était plus à l’inquiétude. La révélation avait eu lieu très simplement : M. Berthier, après avoir, comme on se rappelle, pardonné à Antoine, en était resté préoccupé. Il avait interrogé sur lui ses autres employés. Un d’entre eux lui avait appris qu’Antoine fréquentait une demi-mondaine très élégante du nom d’Angèle d’Azay, — le drôle n’eut pas été complet s’il n’avait pas joint à ses autres vices la vantardise et la fatuité. — M. Berthier avait su aussi que le jeune homme jouait aux courses et de grosses sommes. Des doutes lui étaient venus sur la véracité d’un garçon déjà coupable d’une grande indélicatesse.

Cette histoire Montboron était-elle exacte ? Le chef du bureau C du Grand Comptoir s’était avisé d’une ruse : il s’était muni d’une photographie d’Antoine que celui-ci lui avait donnée au temps de sa faveur. Il était allé au bureau du Crédit départemental, où le pseudo-Montboron était accrédité, et là, sous le prétexte de prémunir le directeur contre un dangereux aventurier, il lui avait montré ce portrait, que celui-ci avait reconnu. Antoine et M. de Montboron ne faisaient qu’un ! Dans son indignation d’avoir été bafoué avec cette audace, M. Berthier avait mis le faussaire en demeure de démissionner. Cette exécution avait eu lieu le mercredi à onze heures, et, à deux, M. Berthier était chez Joseph Monneron. Le reste avait été rapporté exactement dans le billet que le