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Page:Paul Vibert - Pour lire en bateau-mouche, 1905.djvu/448

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petite industrie, alors que pour une femme, obligée de commander à des domestiques, c’était bien véritablement un métier de chien, pour ne pas dire un chien de métier.

Cependant la digne femme était observatrice et un beau jour elle acquit la conviction que la plupart de ses jolies ou sentimentales clientes ne connaissaient absolument rien aux différentes races de chiens.

— Ah, si j’étais en Angleterre, soupirait-elle souvent, ça marcherait mieux, car les Anglais et leurs respectables épouses ont l’amour intelligent et la connaissance raisonnée des chiens.

Ils savent les nourrir, les soigner, les sélectionner. Ici, hélas, rien de semblable. Je n’ai vraiment qu’une clientèle de poupées…

Elle fit venir un grand choix de petits chiens noirs, maigrichons ou maigrelets de Chine, de Cochinchine, du Japon et de Corée et elle faisait remarquer en riant à ses enfants qui montraient toujours leurs dents de jeunes loups que ces petits quadrupèdes leur étaient inférieurs, puisqu’ils étaient absolument sans poil, sauf aux oreilles et qu’eux étaient au moins des Poilras !

Mais la clientèle mordait peu à ces races nouvelles, ingrates et d’ailleurs assez délicates.

Madame Poilras poursuivait silencieusement, mais avec opiniâtreté le cours de ses observations et de ses réflexions, commençant toujours par observer avant de réfléchir, étant une femme de grand bon sens, lorsque tout à coup, pendant le