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SUR DU GUESCLIN.

sur leur defection, disant qu’ils avoient été tous entraînez par la multitude et la populace, dont ils n’avoient pu reprimer la rébellion ; qu’ils benissoient le ciel de ce qu’il avoit exaucé leurs vœux en le rétablissant sur son trône, et que la vie qu’ils luy demandoient ne leur seroit à l’avenir d’aucun usage que pour la sacrifier pour luy contre ses ennemis.

Ils n’oublierent rien pour luy témoigner la joye que leur donnoit le retablissement de sa domination sur eux. Toute la ville fit retentir à son entrée les concerts de musique. À peine pouvoit-il passer dans les ruës tant la foule étoit grande. Touttes les cloches se firent entendre avec un fort grand bruit, les feux de joye que l’on faisoit par tout éclairoient les tables qu’on avoit dressées dans les places publiques, pour y servir des viandes à tous venans. Toute la noblesse d’Espagne courut à Séville, pour feliciter ce prince sur son rétablissement et luy rendre de nouveaux hommages. Ferrand de Castre, qui l’avoit abandonné dans sa disgrâce, vint le rejoindre dans sa prospérité ; mais touttes ces démonstrations de joye, touttes ces démarches honnêtes, soumises et civiles, ne furent point capables d’adoucir le cœur inhumain de ce tyran, qui s’étoit fait une loy de ne jamais pardonner les injures qu’on luy avoit faites, et se réservoit toûjours de s’en venger dans son temps, comme il ne l’a fait que trop paroître dans la suite.