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Page:Pirenne – Histoire de Belgique – Tome 6.djvu/186

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LA SITUATION ÉCONOMIQUE

de l’Escaut passe de 560,850 habitants à 615,689 ; celui de la Lys, de 459,436 à 519,436, celui de l’Ourthe, de 352,333 à 366,676. Gand comptait en 1798, 56,098 âmes, il en compte 62,226 en 1815 ; Liège, qui après avoir eu 50,260 habitants en 1790, était tombé à 38,196 en 1798, remonte à 48,520 en 1811. La population de Bruxelles présente des fluctuations également significatives : 74,427 habitants en 1783, 66,297 en 1800, 72,105 en 1803, 75,086 en 1812. D’une manière générale, il semble que le mouvement ascensionnel de la population ait été beaucoup plus rapide en Belgique que dans le reste de la France. Et cette vigoureuse croissance est d’autant plus remarquable que les guerres napoléoniennes ont été plus dévoratrices. La densité des habitants atteint son maximum dans les départements réunis. Sauf le Nord, aucun département français ne rivalise avec la Lys et l’Escaut qui comptent respectivement 125 et 200 personnes au kilomètre carré.

Une fois de plus, les Belges attestent donc au commencement du XIXe siècle, cette vigueur et cette énergie laborieuse que les catastrophes déchaînées sur leur pays par les fluctuations de la politique internationale n’ont jamais pu abattre. Comme à la fin du XVe siècle, comme sous Albert et Isabelle, comme après 1748, ils ont à peine recouvré le calme qu’ils se remettent au travail. Si la position centrale de leur pays le destine à être le champ de bataille de l’Europe, il en fait aussi un centre admirable d’activité économique, de sorte que, perpétuellement ballotté par les remous de l’histoire, les périodes de marasme et de renaissance y alternent de même que la paix et la guerre. Nulle part ailleurs elles ne sont aussi nombreuses et nulle part non plus elles ne présentent un contraste aussi frappant. Car les conditions mêmes qui vouent ce pays au passage des armées et à leurs chocs y favorisent également le transit et l’échange des marchandises. Périodiquement elles attirent sur lui la ruine, mais elles lui permettent aussi de se relever avec une rapidité surprenante. À peine a-t-il cessé d’être un camp, il se transforme en une manufacture et en un marché.