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Page:Plotin - Ennéades, t. III.djvu/378

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LIVRE QUATRIÈME.

le corps vient à s’accroître, la même âme qui se trouvait précédemment dans une masse plus petite est présente dans toute cette masse devenue plus grande ; or il serait ridicule de supposer que l’âme s’augmente de la même manière qu’une masse corporelle[1].

VI. Pourquoi [si l’Âme universelle possède la grandeur que nous lui attribuons] ne s’approche-t-elle pas d’un autre corps [que de celui qu’elle anime, c’est-à-dire d’un corps particulier] ? — C’est à ce corps à s’approcher de l’Âme universelle, s’il le peut ; en s’approchant d’elle, il en reçoit quelque chose et se l’approprie[2]. — Mais cet autre corps qui s’approche de l’Âme universelle ne la possède-t-il pas en même temps qu’il possède l’âme qui lui est propre, puisque ces âmes [l’Âme universelle et l’âme particulière] paraissent ne pas avoir de différence entre elles ? — Nous répondrons que ces deux âmes diffèrent par leurs attributions [puisque l’une est l’Âme du monde, et l’autre l’âme d’un individu[3]]. — Mais pourquoi admettons-nous que la même âme est présente dans la main et dans le pied, et en même temps que l’âme qui se trouve dans une partie de l’univers n’est point la même que l’âme qui se trouve dans une autre partie ? — C’est que, comme les sensations sont différentes, les passions qui sont éprouvées doivent également différer[4]. Les choses jugées sont diverses, mais le juge est le même principe placé successivement en présence des passions différentes, quoique ce ne soit pas lui qui les éprouve, mais bien le corps disposé de telle manière[5]. C’est comme lorsque quelqu’un de nous juge également le plaisir éprouvé par le doigt et la douleur

  1. Voy. Enn. IV, liv. VI, § 5, n° 9 ; t. II, p. 443.
  2. Cette assertion est expliquée ci-après, § 15.
  3. Sur les différences qui existent entre l’Âme universelle et l’âme particulière, Voy. ci-après § 14 ; et Enn. IV, liv. III, § 6, t. II, p. 275.
  4. Voy. sur ce point Enn. IV, liv. III, § 3 ; t. II, p. 268-271.
  5. Voy. Enn. IV, liv. IV, § 23-25 ; t. II, p. 364-369.