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Page:Plutarque - Vies des hommes illustres, Charpentier, 1853, Tome 3.djvu/665

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lère, ni prompt à s’emporter ; mais, une fois irrité, on ne l’apaisait qu’à grand’peine. Quand on le mit aux études, il avait l’esprit paresseux et lent à comprendre ; mais, ce qu’il avait saisi, il le retenait, et sa mémoire était sûre ; ce qui, au reste, est assez ordinaire. Car les esprits vifs oublient aisément ; et ceux qui n’apprennent qu’à force de travail et d’application retiennent mieux : chaque connaissance nouvelle est comme un feu qui embrase leur âme. Ce qui, d’ailleurs, augmentait pour Caton les difficultés de l’étude, c’était, à mon avis, la peine qu’il avait à croire : en effet, apprendre c’est recevoir une impression ; et ceux-là croient plus aisément, qui peuvent moins comprendre ce qu’on leur dit. Voilà pourquoi les jeunes gens se laissent plus facilement persuader quel es vieillards, et les malades que ceux qui se portent bien. En général, plus la faculté qui doute est faible, plus le consentement est prompt. Caton cependant obéissait, dit-on, à son gouverneur, et faisait tout ce qui lui était prescrit ; mais il demandait raison de chaque chose, et en voulait savoir le pourquoi. Il est vrai que son gouverneur était un homme de bonnes manières, et qui employait le raisonnement bien plus que la menace : il se nommait Sarpédon.

Caton était encore dans l’enfance, lorsque les alliés de Rome sollicitèrent le droit de cité romaine. Pompédius Silo, habile homme de guerre, et qui jouissait parmi eux de la plus grande considération, passa plusieurs jours chez Drusus, dont il était l’ami. Pendant le séjour qu’il y fit, il gagna l’amitié des neveux de Drusus. « Mes enfants, leur dit-il un jour, intercédez pour nous auprès de votre oncle, afin qu’il nous aide à obtenir le droit de cité. » Cépion lui fit en souriant un signe d’assentiment ; mais Caton garda le silence, fixant sur les étrangers des regards durs et sévères. « Et toi, mon enfant, lui dit Pompédius, qu’en penses-tu ? ne parleras-tu pas à ton oncle en notre faveur, comme ton frère ? » Caton, sans