Aller au contenu

Page:Poincaré - Au service de la France, neuf années de souvenirs, Tome 4, 1927.djvu/132

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

parole et son devoir. » M. Alexandre Bérard a raison. Mais quelle lourde et pénible charge que celle d’un chef d’État, dont le rôle est de faire respecter successivement les idées d’autrui et d’abdiquer ses idées personnelles !

Des hommes politiques, des journalistes, des conseillers officieux viennent me voir, qui me rendent responsable des élections et qui me reprochent plus ou moins ouvertement de m’être endormi dans les délices d’Eze, au lieu de prendre moi-même le commandement en chef du suffrage universel. Je les sens désappointés, aigris, sourdement irrités. La plupart d’entre eux m’engagent à saisir la première occasion de constituer un ministère Delcassé. Mais M. Delcassé, qui fût volontiers devenu Président de la République ou Président de la Chambre, a toujours eu fort peu de goût pour la présidence du Conseil et, du reste, M. G. Doumergue ne m’a pas encore annoncé lui-même son intention de se retirer. Je n’ai aucune raison, loin de là, de provoquer sa démission.

Une courte diversion m’est offerte par un voyage que je fais à Lyon, les 22, 23 et 24 mai, en compagnie du ministre du Commerce, M. Raoul Péret. M. Herriot, maire de la ville, qui m’a depuis longtemps adressé une invitation, a, comme sénateur radical, publiquement contribué à mon élection présidentielle. Il administre sa grande cité avec une intelligence et un dévouement auxquels ses adversaires eux-mêmes rendent hommage. C’est un lettré et un artiste. Il m’est agréable de répondre à son appel.

Dès mon arrivée, je trouve dans la population lyonnaise une chaleur d’accueil à laquelle n’est sans doute pas étrangère une très bienveillante affiche