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Page:Proudhon - La Guerre et la Paix, Tome 2, 1869.djvu/150

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veulent aux biens ; ce sont à la fois les esprits les plus logiques et les plus pratiques de tous. La guerre des paysans du Rhin et de Westphalie était la conséquence autant des conseils réformistes du pieux et orthodoxe Gerson que des théories de Luther et du soufflet donné par Nogaret à Boniface VIII.

Il est inutile que nous insistions davantage. Les constitutions d’Églises et d’États ne sont à autre fin que de protéger, équilibrer ou hiérarchiser les intérêts. Or, comme par l’instance du paupérisme les intérêts sont toujours en opposition, toujours en souffrance, l’agitation est permanente ; les révolutions en sont les crises. Tout débat politique, économique, religieux ou social, ramené à sa véritable signification, se résout en jacquerie.


Soit, direz-vous, l’influence du paupérisme sur l’État est un fait acquis : c’est lui qui est la cause première des révolutions. On pourrait presque regarder cela comme une vérité de la façon de M. de la Palice, tant elle rentre dans le lieu commun. Mais venons à notre sujet. Est-ce aussi le paupérisme qui est la cause première des guerres ? Comment les peuples que la misère agite, non contents de s’en prendre à leurs gouvernements, à leurs nobles, à leurs clergés, à leurs dynastes, à leurs bourgeois, en viennent-ils à s’accuser les uns les autres et à se faire une guerre aussi aveugle qu’inutile ?

Je pourrais, comme tant d’autres, me rejeter sur la folie humaine, les mauvais conseils de la faim, le machiavélisme des princes et des nobles, qui dans tous les temps ont saisi les occasions de faire la guerre comme un moyen de diversion pour les impatiences populaires et de sauvegarde pour leur pouvoir. Ces considérations ont leur vérité, que je ne nie pas : toutefois, elles ne sauraient satisfaire entièrement l’esprit. Il est impossible, en bonne critique,