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Page:Proudhon - La Guerre et la Paix, Tome 2, 1869.djvu/292

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toutes les autres, la question économique. Il faut l’aborder, enfin ; on saurait d’autant moins y échapper que, cette question une fois soulevée, toutes les autres deviennent de purs prétextes, et des prétextes de mauvaise foi. Or, cette question n’est évidemment pas du ressort de la guerre. Donc il faut, en premier lieu, que la guerre s’ajourne jusqu’à solution du problème posé ; puis, au cas où cette solution serait obtenue, la cause qui produit la guerre étant par le fait supprimée, il faut que la guerre donne sa démission.

« Sophisme de procureur. Admettre ce déclinatoire serait renverser l’ordre de la justice : nous allons te prouver par une analogie empruntée à l’économie politique elle-même.

« L’agriculture est certainement du ressort de l’économie politique. Elle ne relève pas, en tant qu’industrie, du droit civil. Cependant, pour que la terre soit cultivée, il faut au préalable qu’elle appartienne à quelqu’un. Point de propriété, point de culture ; partant point de subsistances. Tous les économistes en conviennent. Or, qui décide de la propriété en cas de litige ? Le tribunal civil. Le juge ira-t-il s’enquérir si le droit économique domine ici le droit civil ? Non : il adjugera la terre au légitime propriétaire, à qui il dira de cultiver son champ à sa guise, suivant la science ou suivant son plaisir.

« Il en est ainsi des questions de souveraineté. Elles requièrent solution indépendamment des questions d’économie générale qui s’y rattachent, ou qui même les produisent. En conséquence, les rapports économiques des nations sont réglés par des traités de commerce, amiablement conclus. Mais, de même que la culture du sol présuppose une propriété, les traités entre nations présupposent une souveraineté, qui, si elle est mise en jeu, devient immédiatement justiciable de la guerre.