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Page:Proudhon - La Guerre et la Paix, Tome 2, 1869.djvu/295

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çais, mais les Allemands, les Italiens, les Suisses, les Hongrois, les Russes, toutes les nations signataires des traités se sont mises à accuser à l’envi les actes du Congrès de Vienne, monuments de la plus grande et de la plus glorieuse paix qui ait été faite parmi les hommes. N’est-ce point qu’au fond la paix n’est jamais qu’un rêve : Dicebant : Pax, pax, et non erat pax ? Dès que la paix se prolonge, les populations s’inquiètent comme si elles allaient mourir, comme si la civilisation manquait à sa destinée, qui est de marcher de découverte en découverte et de bataille en bataille.

« De là, ces idées singulières, où le mysticisme et l’empirisme se donnent la main, mais qui témoignent d’une raison supérieure à celle des philosophes :

» Que la guerre entre dans les desseins de Dieu et dans l’ordre de la Providence ;

» Que par la paix les sociétés se corrompent et qu’elles se régénèrent par le sang ;

» Que la paix perpétuelle, comme le souverain bien, est un absolu, une chose hors de ce monde ;

» Que la destinée terrestre de l’homme est de faire la guerre à son prochain, attendu qu’il ne saurait se délivrer jamais, par la science de tout doute et de toute dispute, par la richesse de toute gêne ;

» Que le contraire supposerait une métamorphose des idées, des passions, des caractères, des mœurs, que rien ne permet de prévoir ;

» Qu’ainsi ce n’est pas à tort que la profession des armes est considérée comme la plus noble, puisque c’est celle qui exprime le mieux la divinité de notre nature ;

» En conséquence, que l’hypothèse d’une paix permanente, indéfectible, est une erreur dangereuse, contraire à la religion, à la morale, à toutes les traditions, subversive de toute hiérarchie comme de toute discipline, et déjà