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Page:Proudhon - La Guerre et la Paix, Tome 2, 1869.djvu/299

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tout s’explique : la thèse de la guerre devient la thèse de la paix.

Le monde de la société, de même que le monde de la nature, est établi sur des forces.

Ces forces sont d’elles-mêmes expansives, envahissantes, par conséquent opposées et antagoniques ; elles vivent et se développent aux dépens les unes des autres et ne produisent qu’en raison de leur consommation mutuelle. Telle est la grande loi de la création, qui est en même temps la loi de la conservation et du renouvellement des êtres.

Ceux qui croient à la perpétuité de la guerre se prévalent donc de cette théorie générale des forces, de leur antagonisme et de leur absorption réciproques. « L’humanité, disent-ils, de même que la nature, est toujours en création, toujours en renouvellement : et c’est par la guerre qu’elle se crée et se renouvelle. Parler de paix, c’est affirmer la décadence et la mort. »

Mais, avant de se prononcer d’une manière aussi affirmative sur l’avenir belliqueux de l’humanité, il conviendrait de s’être assuré de deux choses : 1° Quel est le genre de création que poursuit la guerre ; 2° Si l’antagonisme des forces, que-nous avons jugé irréformable en sa condition actuelle, n’est pas susceptible d’une transformation, qui ne serait autre que le but même poursuivi par la guerre.

Car, et nos adversaires sont de cet avis, l’antagonisme n’a de valeur que par la création dont il est l’agent. Toutes les fois qu’une guerre éclate entre deux puissances, c’est en vue d’un nouvel état de choses qui, dans l’ordre providentiel, doit être substitué à l’ancien, soit qu’il s’agisse de la formation d’un nouvel état en remplacement des autres, soit que la guerre ait simplement pour but de déterminer leur étendue et leurs rapports. Mais quel est le but général de la guerre ? Depuis trois mille ans, nous l’a-