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Page:Ravaisson - De l’habitude, 1838.djvu/19

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des organes nouveaux qui reçoivent à des distances de plus en plus grandes l’impression des objets extérieurs. Dans ce nouveau période, se prononce avec une force nouvelle le contraste de la réceptivité et de la spontanéité.

En effet, dans le monde inorganique, la réaction est exactement égale à l’action, ou plutôt, dans cette existence tout extérieure et superficielle, l’action et la réaction se confondent : c’est un seul et même acte, à deux points de vue différents. Dans la vie, l’action du monde extérieur et la réaction de la vie elle-même deviennent de plus en plus différentes, et paraissent de plus en plus indépendantes l’une de l’autre. Dans la vie végétale, elles se ressemblent encore et s’enchaînent de près. Dès le premier degré de la vie animale, elles s’écartent et se différencient, et à des affections imperceptibles de la réceptivité répondent des agitations plus ou moins considérables dans l’espace. Mais aussitôt que l’animal se meut et se transporte tout entier, l’opposition de la réceptivité et de la spontanéité prend un caractère tout nouveau. Les objets extérieurs font impression sur les organes propres de cette réceptivité supérieure, par l’intermédiaire de fluides de plus en plus rares et subtils, l’air et l’éther, tandis que les mouvements qui semblent répondre à ces impressions sont de plus en plus amples, et de plus en plus compliqués.

La double loi de l’influence contraire de la durée du changement sur l’être, selon qu’il le subit seulement ou qu’il le commence, la double loi de l’habitude doit donc aussi se manifester ici par des traits plus sensibles et plus incontestables. Les impressions perdent leur force à mesure qu’elles se reproduisent davantage. Or, les impressions sont ici de plus en plus légères, et intéressent de moins en moins la constitution physique des organes. L’affaiblissement graduel de la réceptivité semble donc de plus en plus l’effet d’une