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Page:Renouvier - Les Dilemmes de la métaphysique pure, 1901.djvu/200

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LVIII

L’obstacle a la reconnaissance philosophique de la personnalité. — Cette marche d’une primitive pensée philosophique est commandée par la puissante objectivité sensible du monde externe, qui, sitôt que l’idée générale de chose est formée et généralisée ne permet plus à celles de personne et volonté de garder la primauté dans les imaginations touchant la nature. L’abstraction qui a été primitivement nécessaire pour former l’idée du phénomène séparément de sa cause et de toute activité volontaire ne trouve plus sa place quand la question de la nature de l’être se pose sur le tout du monde objectif et non plus sur des phénomènes séparés ; c’est, au contraire, l’idée de la personne qui semble maintenant une abstraction à l’égard de la chose universellement enveloppante dont les personnes font partie. La vérité dont le sentiment sourd entrait dans l’imagination mythologique est perdue, cette vérité, qu’il n’est rien d’intelligible sans la conscience. La conscience est, en effet, chez l’homme qui perçoit les phénomènes, la condition des choses qui lui sont représentées, puisque, si elle lui est retirée, le monde disparaît pour lui ; et la conscience, quand on n’en place pas les premiers éléments dans l’essence des êtres perçus de ce monde, les laisse inintelligibles, tout ce qu’ils ont de percevable se trouvant alors transporté à l’être qui perçoit.

Il a fallu les longs et difficiles travaux des penseurs dans la direction idéaliste, et le progrès lent de la critique du savoir, dans la mêlée des doctrines, pour que des philosophes comprissent que l’objet n’est jamais