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Page:Renouvier - Les Dilemmes de la métaphysique pure, 1901.djvu/222

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encore que sans organisation et sans évolution vitale.

En considérant sous cet aspect un monde extérieur réel et son fondement matériel, on rend aux propriétés constitutives des esprits, pour l’œuvre de la perception externe, l’étendue et tout ce qui ne saurait être sujet pour soi. C’est un idéalisme monadologique, c’est-à-dire une conception ontologique d’un genre tel, qu’elle évite également le réalisme des abstractions et le réalisme de la pure matière, et, ne comportant pour son explication d’autres éléments que les phénomènes et leurs lois rapportées à l’intelligence, reste fidèle au principe de relativité. Berkeley ne l’adopta point quoiqu’elle fût complètement à l’abri de ses arguments contre l’existence de la matière. Son immatérialisme passa dès lors pour une négation de la réalité du monde extérieur. La personnalité, soit en Dieu, soit dans l’homme, semblait cependant jusque-là n’avoir rien à souffrir de l’abolition du monde physique. Mais il restait à savoir quelle origine serait attribuée aux perceptions qui ont un caractère passif.

Au fond et à proprement parler, le système de Berkeley n’était pas cette négation que l’on crut du monde extérieur, mais bien une nouvelle espèce du réalisme, nouvelle, bien qu’analogue à celle de Malebranche, ainsi qu’on l’a toujours reconnu, différente seulement dans la manière de définir les objets représentatifs, ou idées, dont Dieu se sert pour nous donner nos perceptions.

L’hypothèse est que, les corps n’ayant pas une existence réelle et pour eux-mêmes, — ou, d’après Malebranche, existant sans doute mais sans être perceptibles aux esprits, — Dieu soit l’auteur vrai de nos perceptions des corps, et nous les fasse avoir, selon les rencontres, conformément à des lois qu’il a établies. Ber-