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Page:Renouvier - Les Dilemmes de la métaphysique pure, 1901.djvu/277

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sens formel de la création, imposé par la tradition, chrétienne et transporté par les théologiens à leur doctrine de la création continuée.

Les idées d’absolu, d’inconditionné et de nature nécessaire n’ont cessé de se placer, en théologie, malgré la consubstantialité des deux premières personnes hypostatiques, au-dessus de la trinité elle-même, parce que le point de vue de la substance est, malgré tout, corrélatif à celui de ses modes, et ses modes relatifs au monde. La métaphysique dont nous suivons les étages superposés, en s’élevant du déterminisme au principe des déterminations ne peut s’arrêter qu’en atteignant l’inconnaissable, sans qualités, source de toutes les qualités et de toute connaissance.

Voilà pourquoi, quand le déclin de la théologie est venu, puis sa ruine, jusque dans les esprits où s’étalent les apparences de sa conservation, et quand la force de l’Église s’est montrée à découvert dans ses vraies causes actuelles, qui n’ont rien de métaphysique, les philosophes émancipés sont revenus à l’antique domaine de la philosophie, au jeu des hypostases sans personnalité. L’Inconditionné a repris sa place à la tête du monde dans la métaphysique kantienne, et l’Inconnaissable, autre nom de cet absolu, au fondement du réalisme de H. Spencer. La Substance, sous divers noms de ce qui n’est que l’Universel abstrait, qu’on a substitué à la conception concrète, plus profonde et-plus rigoureusement définie de Spinoza, est venue se placer sous l’Inconditionné kantien, pour lui fournir des hypostases développables et ouvrir des sources d’émanation d’espèce nouvelle : évolution du Moi sujet pur, évolution de l’Identique, de l’Idée, de l’Inconscient, de la Force, etc. La personne est regardée comme le produit par voie