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Page:Restif de la Bretonne - La Dernière Aventure d’un homme de quarante-cinq ans, éd. d’Alméras.djvu/240

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LA DERNIÈRE AVENTURE

jamais le même ; il ne fera qu’un de nous deux. J’en répète le serment ; je suis à Delarbre pour toute ma vie.

& Sara Debée. »


Second Billet de la même au même

« Ha ! qu’un cœur est à plaindre, lorsqu’il aime sincèrement et qu’il est éloigné de l’objet de sa tendresse ! Que je te plains, Delarbre, si tu as souffert la centième partie de ce que j’éprouve, depuis ton absence ! Mais, hélas ! ce ne sont encore là que des roses ! Tu partiras un jour ; je serai des semaines, des mois, sans te voir : que deviendrai-je, puisqu’un jour, un seul jour fait couler mes larmes ? Mais souviens-toi, Delarbre, une fois pour toutes, que s’il faut nous séparer, le cœur de ta Debée, de ta femme, partira avec toi… Ha ! je maudis l’amour mille fois par jour ! Pourquoi faut-il que j’aie aimé, pour être séparée si promptement et pour si longtemps, du seul homme qui ait encore touché mon cœur ! Oui, je répéterai sans cesse ce mot, que tu as tant chanté sur ta guitare :

Qu’on est heureux
Quand on est deux ! »


Troisème Billet de la même au même

« J’ai appris hier, mon bon ami, une fort mauvaise nouvelle ! On m’a parlé d’un nouveau parti[1]. Mais tu peux être persuadé, que quand ce serait un Mylord, je te préférerais toujours. Ainsi compte sur l’amitié que j’ai pour toi. J’oublie tous mes malheurs, dès que je songe et que je parviens à me persuader que nos deux cœurs sont faits l’un pour l’autre.

« Au bonheur de te voir. »

« P.—S. J’ai passé tout le reste de ma journée à gémir, et à soupirer d’être éloignée de toi ! Je ne sais absolument comment je pourrais faire, s’il fallait que nous fussions séparés pour toujours, puisqu’il est vrai qu’une heure sans te voir me paraît être deux siècles et demi. Ha ! que je sens bien actuellement ce que tu me disais, il y a quelques semaines, qu’un jour passé loin de ce qu’on aime est une éternité !… Je crois qu’il

  1. Il est ici question de M. Legrainier, qu’on voulait substituer au monsieur du Palais-Royal.
    (R.)