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Page:Restif de la Bretonne - La Dernière Aventure d’un homme de quarante-cinq ans, éd. d’Alméras.djvu/289

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D’UN HOMME DE QUANRANTE-CINQ ANS

Je vous aime,
Mon ardeur extrême
Pour vous durera toujours,
Et de mes jours
Finira le cours.
À ce discours, Iris
En vain retient ses larmes ;
Bientôt Tircis
Les voit couler ; pour lui que de charmes !
Sans rien dire,
La belle soupire :
Mais regardant son amant
D’un air charmant,
Chanta tendrement :
— Je vous aime, etc.


Cette dernière chanson, fut très applaudie par les inconnues ; Sara l’avait chantée avec un goût exquis, sans doute, parce qu’elle était animée, et qu’elle lui fournissait l’occasion de me dire son sentiment sur ma jalousie, en même temps qu’elle voulait me confirmer ses tendresses.

Nous nous aperçûmes, en ce moment, qu’on venait à nous. Sara se mit à fuir entre deux sillons ; lorsque nous fûmes seuls et un peu loin, elle me fit asseoir dans le seigle le plus touffu… J’oubliais la nature auprès d’elle, je m’oubliais moi-même et mes serments passés et mes rivaux, et ses perfidies, et ses duretés ; je ne voyais plus que Sara, non la tendre Sara des premiers temps* mais une fille vive, enjouée, folâtre…

Nous rejoignîmes enfin sa mère et Florimond ; mais avant de les aborder, nous remplîmes nos mains de fleurettes blanches, d’une odeur très suave, qu’on appelle en quelques provinces des claquets, et ce fut le prétexte du long temps que nous étions restés éloignés. Nous rentrâmes à la ville à une heure du matin fatigués, mais divertis, pleins de gaité, en nous promettant de faire souvent de ces parties, si favorables à la santé.

Rentré chez moi, je me dis : « Comme les années se ressem-