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Page:Restif de la Bretonne - La Dernière Aventure d’un homme de quarante-cinq ans, éd. d’Alméras.djvu/68

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LA DERNIÈRE AVENTURE

me proposant d’en bien agir avec vous, mais à mon âge, je ne saurais me flatter à ce point ; cependant, je ne puis être heureux si je ne suis aimé ; si je ne le suis désintéressement, c’est-à-dire indépendamment de ma fortune et même des engagements que je me propose de prendre avec vous… Si votre cœur est incapable d’éprouver ce sentiment nécessaire à mon bonheur, au moins faites-moi une illusion complète en me persuadant que je vous l’ai inspiré… Pour cela, ma belle, je voudrais vous voir prendre en moi une confiance entière, et m’abandonner votre personne, votre intérêt, votre… honneur… oui, jusqu’à votre honneur ? Parlez, belle Élise ? — Je crois, monsieur, que je ne risquerais rien, de confier mon honneur à l’homme qui veut s’unir à moi par les liens les plus forts et les plus doux ; je suis disposée à vous donner cette marque de confiance que vous désirez… Cependant, je voudrais que nous nous fussions vus un peu plus longtemps. — Vous consentez à ce que je désire, je suis content, charmante fille, je ne vous presserai pas davantage aujourd’hui de m’accorder ce que je vous demande, mais j’en désire la promesse pour la première fois ? — Vos discours aujourd’hui, monsieur, m’inspirent déjà cette confiance que vous désirez ; je vous en donnerai toujours des marques plus fortes, à mesure que je vous connaîtrai davantage ; non, je n’hésite pas à vous faire la promesse que vous exigez. »

M. de Blémont qui donnait à cette demande un sens beaucoup plus étendu qu’Élise ne l’entendait, fut enchanté de cette promesse et peut-être regarda-t-elle son triomphe comme absolument décidé. En quittant Élise, il vit Parlis et il lui parla d’elle comme d’une jeunesse absolument à lui. Il devait revenir le surlendemain. Élise eut un jour d’intervalle pour faire ses réflexions sur ce que lui avait dit M. de Blémont ; elle y entrevit quelque mystère et, dans l’après-midi du lendemain, elle consulta Parlis. Cet homme était trop éclairé, pour ne pas découvrir le but de son ami ; tout ce qui suspendit son jugement c’est qu’il l’estimait trop pour en croire ses propres lumières. Cependant, il donna quelques avis sages à Élise sur la conduite qu’il serait à propos qu’elle tint avec