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Page:Restif de la Bretonne - La Dernière Aventure d’un homme de quarante-cinq ans, éd. d’Alméras.djvu/72

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LA DERNIÈRE AVENTURE

dites-là, monsieur, qui n’est rien en lui-même, me fait mieux connaître votre caractère que tout le reste. Je vous quitte et retourne auprès de ma mère. Je ne refuse pas votre main, mais je me propose de n’avoir plus d’entretien avec vous que le jour du mariage, s’il a lieu. »

En achevant ces mots, elle courut à la porte, l’ouvrit et laissa M. de Blémont seul. Il la suivit un instant après ; fort irrité d’être trompé dans les folles espérances qu’il avait conçues, il était en colère surtout contre Parlis qu’il soupçonnait de diriger la conduite d’Élise. Au fond, il ne se trompait que dans l’intention qu’il supposait à son ami Parlis, qui voyant que M. de Blémont, avec ses sentiments, ne trouverait jamais le bonheur qu’il cherchait, avait tâché de le forcer à devenir heureux. Il avait en vue son intérêt, autant qu’il avait à cœur celui d’Elise, et il s’était généreusement sacrifié à tous les deux. L’injuste de Blémont n’en eut pas cette idée, que tout parut confirmer dans la suite. Mais ce jour-là, en quittant la mère d’Elise, il joignit Parlis, ils sortirent ensemble et M. de Blémont lui détailla ses griefs. Non seulement, il accusa Élise d’intérêt, de froideur, de savoir beaucoup, mais, interprétant l’indulgence de cette jeune personne à son désavantage, il osa l’accuser de facilité, il en cita des preuves à son ami. Parlis lui fit observer qu’il y avait contradiction et qu’il n’inspirait donc pas de répugnance si l’on avait marqué tant d’indulgence pour des procédés qui n’en méritaient aucune ? Comme il n’avait pas encore parlé à Elise et qu’il ignorait ses nouvelles dispositions, il ménagea M. de Blémont et ne voulut pas avoir à se reprocher d’avoir occasionné une rupture par des reproches trop durs et peut-être déplacés. Il était, cependant, blessé jusqu’au vif des confidences que lui faisait son ami et il réfléchissait au rôle indigne dont on le chargeait gratuitement. Il ne pouvait s’empêcher de penser : mais quelle opinion a-t-il donc de moi ?… » Ce qui redoublait ses doutes, c’est qu’à tout moment il s’apercevait que M. de Blémont avait des idées fausses. En rendant compte de sa conversation avec Elise et de la défense de cette jeune personne. Élise lui avait dit,