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Page:Restif de la Bretonne - Monsieur Nicolas, t. 2, 1883.djvu/117

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comme une déesse. Ce n’était pas de l’amour seulement qu’elle m’inspirait, c’était de la tendresse, de l’attachement, de l’adoration… (Colette m’inspirera tout cela, et, de plus, du respect, de la reconnaissance )… Voilà le récit vrai, naïf, de mon aventure essentielle avec Marguerite, préméditée sans dessein, réalisée sans corruption. Je ne me charge, ni ne me justifie ; je raconte les choses telles qu’elles sont arrivées ; et une preuve que je n’avais pas eu de mauvaises intentions, c’est que je n’eus pas de remords ; je ne crus avoir manqué ni à la morale, ni à Jeannette. Marguerite pensa n’avoir manqué ni à son devoir, ni à son mari ; mais elle eut quelques doutes apparemment dans la suite, où le confesseur l’interrogea (usage dangereux le plus souvent, puisque l’oubli malicieux est seul coupable), et elle sut enfin qu’elle avait fait une faute… Revenons.

Lorsque mon habit fut achevé, je repartis pour Courgis ; mais je n’avais pas perdu mon temps tout à fait : j’avais apporté quelques livres, et travaillé. À mon retour, je me remis à l’étude, avec une ardeur à laquelle la vue de Jeannette donna un nouveau degré de force.

Quelque temps après, vers les vendanges, nous fîmes un autre voyage à Sacy, l’abbé Thomas, et mes deux camarades, Huet et Melin, qui furent si pénétrés de respect pour les auteurs de mes jours, qu’ils ne pouvaient finir sur l’éloge de leur bonté. En effet mon père et ma mère, voyant deux camarades, avec qui vivait leur fils, chez un autre fils