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Page:Restif de la Bretonne - Monsieur Nicolas, t. 2, 1883.djvu/158

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seté ! » s’écria mon oncle ; « la garçonnière ! elle aurait aimé le petit Rousseau, qui sûrement l’a bouchonnée ; et à présent, elle essaierait du petit Denêvres… tout en attendant un troisième, qu’elle essaiera encore. » Je n’avais rien à répondre à un pareil langage, dont je connaissais les motifs. D’ailleurs, ce que mon oncle venait de dire de M. Rousseau me coupait la parole, et j’avais le cœur serré…

Denêvres trouva l’occasion de me reparler. Je le traitai avec d’autant plus de douceur, que je souffrais son même tourment, puisque je m’étais convaincue que M. Rousseau recherchait Mlle Stallin ; je fus touchée de compassion pour lui, et pour moi-même… Mais je lui conseillai de songer à une autre, pour son établissement — « C’est l’impossible. Mademoiselle Marguerite ! » me répondit-il, « car vous avez mon cœur ; et personne que vous ne l’aura jamais, ni mon corps non plus, car je ne veux pas donner l’un sans l’autre. S’il faut attendre vos vingt-cinq ans, je les attendrai. » Je voulus le dissuader ; mais il demeura ferme. Malheureusement, sans que je m’en doutasse, mon oncle nous avait écoutés. La manière dont j’avais parlé à Denêvres le mit en fureur ; il en conclut que, si je n’aimais pas la personne, j’aimais le mariage, puisque j’avais si facilement donné à M. Denêvres la place qu’occupait M. Rousseau. Il monta au grenier, armé d’un fusil chargé, tira de la fenêtre qui donnait sur la