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Page:Restif de la Bretonne - Monsieur Nicolas, t. 2, 1883.djvu/159

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ruelle par laquelle Denêvres, en se retirant, tâchait encore de me voir, et le blessa mortellement. L’infortuné ne poussa pas un cri, et se traîna jusqu’à sa maison, sans être vu. Faute de s’être fait panser, de crainte de découvrir le crime de mon oncle, il mourut de sa blessure quinze jours après. Tout le monde dit, et on a cru, qu’il était mort d’amour pour moi : ce qui n’est pas tout à fait vrai, mais autant vaut. Le don de tout son bien, dont je jouis actuellement, confirma dans cette idée. Denêvres, au lit de la mort, m’écrivit une lettre où il me détaillait tout, sans rien déguiser, me priant de la brûler après l’avoir lue. Je reprochai néanmoins à mon oncle une aussi vilaine action. Il me répondit par de sanglants reproches, et par une violence que je ne puis vous répéter… Et sur ce qu’ensuite je sanglotais, il me dit qu’il ne pouvait supporter l’idée que je le quittasse ; ce qui n’aurait pas manqué d’arriver bientôt, d’après ce qui s’était passé entre mes deux amants, et moi. — « Je n’en voulais pas plus à Denêvres qu’a Rousseau, ni à ces deux qu’à tout autre qui voudrait t’avoir à mon préjudice. — Vous avez réussi, » lui dis-je éplorée, « à m’empêcher de me marier ! Jamais aucun homme ne me sera rien ; j’en fais le serment à Dieu… » Je l’ai tenu.

Après la mort de mon oncle, qui arriva dans l’année, le jour même de l’octave du mariage de M. Rousseau, le dernier que M. Polvé ait célébré,