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Page:Restif de la Bretonne - Monsieur Nicolas, t. 2, 1883.djvu/188

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1749 — MONSIEUR NICOLAS

me faisant signe de m’asseoir. Et moi, je pensai intérieurement qu’il n’avait rien cru de l’histoire que j’avais faite à dîner, ou que, s’il l’avait crue, il ne la croyait plus.

Pendant tout le temps que j’avais parlé, j’avais eu le plaisir d’entrevoir les beaux yeux de Jeannette fixés sur moi ; j’en avais été d’abord troublé, mais insensiblement je m’étais enhardi ; je remarquai aussi l’admiration de tout le Catéchisme pour ma doctrine.

Après l’instruction élémentaire, les garçons récitaient l’Épître du jour, et les filles l’Évangile. Le pasteur faisait lever qui bon lui semblait, au commencement, au milieu, à la fin : il fallait donc avoir tout appris. Toutes les mémoires furent mauvaises, ce jour-là. Or il faut savoir, qu’après que nous avions eu appris, mes camarades et moi, le Nouveau Testament entier, dix à douze versets par jour, on nous faisait réciter l’Évangéliste ou l’Épître apostolique d’un bout à l’autre. Mes deux condisciples avaient constamment échoué. Pour moi, qui n’oubliais rien, je me contentais de relire deux fois mon Évangéliste, et le samedi, je récitais. Je ne m’arrêtais pas : j’allais toujours, suivant le sens à la piste, et changeant des mots… L’abbé Thomas, qui me voulait humilier, comptait mes synonymes pour des fautes, et comme la quantité en était fixée, j’avais eu… le fouet (à la grande indignation de Marguerite !) tandis que mes camarades, restés cent fois court, n’avaient éprouvé que son indul-