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Page:Restif de la Bretonne - Monsieur Nicolas, t. 2, 1883.djvu/221

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eut horreur de ma faute, que l’abbé Thomas lui-même exténua, en disant que, depuis mes vers, on m’avait peut-être traité avec trop de sévérité (ce fut la première fois que ma mère entendit parler de mes malheureux vers) ; mon père, dis-je, partit sur-le-champ pour Joux, dont j’avais pris le chemin. Il ne sut rien de ma sœur Marianne Marsigny, qui ne m’avait pas vu. Rempli d’une mortelle inquiétude, il s’en revenait… Mais où avais-je été ?

En sortant de la maison, paternelle, où je n’avais rien avoué, je sentis que j’étais sans ressource ; que pour m’éloigner, il fallait mendier. Cette idée m’attrista. Parvenu vis-à-vis le Bout-Parc, j’y entrai pour réfléchir, et j’y versai des larmes améres ! J’étais à deux pas de mon vallon ; mon accablement éteignit le désir de le revoir : le chagrin, et surtout l’inquiétude, empoisonnent tous les plaisirs. Je passai une partie de la journée couché, à sentir puérilement ma situation déplorable, sans imaginer de moyen d’en sortir. Enfin, le besoin de manger devenant pressant, je me déterminai à retourner chez mon père et à prendre conseil des circonstances.

Mon père revenait de Joux, et comme j’allais fort lentement, il me joignit vis-à-vis la Chapelle, assis derrière un buisson, profondément concentré. « Nicolas ? » me dit-il en riant, « hé ! que fais-tu là ? » Cette manière de me parler me fit croire qu’on ne savait rien encore. — « Je m’en revenais, mon père. — Allons-nous-en donc ensemble. » Il ne me dit rien du motif de son voyage à Joux, que je crus un