Page:Restif de la Bretonne - Monsieur Nicolas, t. 2, 1883.djvu/231

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quait entre autres choses : « J’ai appris de M. Stallin, notre quêteur auprès de vous, qu’il vous avait beaucoup parlé de M. le curé de Courgis et de son frère, mais qu’il ne vous avait pas dit un mot de moi. Or, je serais peiné qu’un aussi digne ministre des autels que vous l’êtes, ignorât mon existence et l’estime que je fais de lui ; c’est pourquoi je vous fais cette lettre, pour vous marquer ma haute estime et ma sincère amitié… » etc.

1750 Mon frère aîné revint de Paris pour la semaine sainte. Jusqu’à son retour, j’avais étudié par intervalles : l’abbé Thomas, quoique ennemi déclaré des études, n’osait prendre sur lui de m’en empêcher ; il craignait mes plaintes à mon père. Peut-être aussi que ses fréquents et puérils badinages avec sœur Pinon, ne laissaient pas de l’intimider. (Il faut que je me permette ici une singulière remarque ! l’Amour soumet tout, même les plus fanatiques dévots. L’abbé Thomas était machinalement ému par les contours moelleux de sœur Pinon, tandis que le curé se voyait peut-être, avec quelque plaisir, adoré par la provocante Chevrier : j’en juge par le ton affectueux avec lequel, dans leurs conversations, il l’appelait Ma chère sœur. Tout cela se voyait, et j’étais loin de m’en scandaliser ! J’accordais à mes aînés toute la vertu qu’ils pouvaient désirer ; mais peut-être étaient-ils blessés que j’eusse osé mettre dans mon sérail quelques-unes de leurs ouailles chéries). J’étudiais, seul à la vérité ; l’abbé Thomas, sous prétexte d’occupations, paraissait ne me donner aucune atten-